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Audierne Polynésie Bretagne : Contes et légendes, Histoire. Minorités ethniques : Thai, H'mongs, Boni, Saramaca Civilisations disparues : Angkor (Camboge),Minoenne (Crète), Mayas et Aztèques (Mexique). Sud Maroc, Thaïlande

Le Guilvinec : débarquement de la pêche

Erwan

… Suite de l'article précédent….

Sur le quai du Guilvinec, il n'y a pas seulement des spectateurs. Les Affaires Maritimes sont là également, toise à la main, pour contrôler la pêche du jour. Si la langoustine ne dépasse pas la taille prescrite, soit 9 cm, toute la pêche est saisie.

 

 

 










 

 


 

Le contrôle continue à bord du bateau de pêche : livre de bord et matériel de pêche. Petite remarque : le nom du bateau, en breton, "Gwenvidik" signifie "Bienheureux".

 





 

 




























 

Les goélands aussi prélèvent leur part !

 

 

 

 

 

 

 


 

 

Suite du conte de Pierre Jakez Hélias :
Le pêcheur Nonna

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

Et le pêcheur Nonna se retira sans bruit. La tête chaude et le pas vif. Un peu plus loin, il rencontra un vieillard qui fumait sa pipe à l'abri d'un talus :

- Est‑ce que je suis encore loin de Kerstribilh, grand-père ?

- Tout près, mon fils. Traversez ce champ découvert et descendez dans le vallon, droit sur le verger de pommes que vous voyez devant vous. C'est là. Mais vous n'êtes pas de par ici, vous ? Un homme de la côte, sans doute. On dit que les poissons se font plus rares que les poux. Est-ce vrai ?

 

 

 


 

 

 

 

 


 

 

‑ Je ne sais pas, maintenant. J'étais pêcheur, oui. Mais, depuis quelques temps, j'habite au Paradis.

‑ Au Pa... Para... bredouilla le vieux en laissant tomber sa pipe entre ses sabots.

‑ Et alors ! Pourquoi vous étonner ? Il y a quand même plus de gens au Paradis que sur cette terre, non ! Vous verrez, bonhomme. A bientôt ! »

 












 

 

Nonna descendit vers Kerstribilh en espérant fermement que les hommes seraient encore aux champs. A la campagne, il vaut mieux avoir à débattre avec les femmes, n'importe quel chemineau vous le dirait. Elles tiennent la maison et la bourse. On peut les prendre de court sur certains sujets, là où précisément les hommes vous opposent la plus grande méfiance, avec leur manie d'enfoncer les doigts dans les plaies du Christ avant de croire à la Résurrection.

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


 

 

C'est pourquoi le pêcheur fut joliment soulagé quand il entendit la voix d'une vieille femme lui crier d'entrer, une fois qu'il eut fini de dévider son pater à haute voix sur le seuil. La maîtresse de la maison était penchée sur l'âtre, occupée à faire des galettes. Elle ne se retourna pas pour le regarder.

 









 

 

 


 

 

 

 

 

 

 


 

‑ La bénédiction de Dieu sur vous, ma tante, et sur toutes les âmes qui habitent cette maison.

‑ Asseyez-vous sur le banc, mon pauvre homme. Laissez-moi venir à bout de cette galette qui fait sa mauvaise tête. C'est la faute du vent aussi. Il n'arrête pas de virer. Vous venez de loin ?

‑ De très loin. J'ai traversé un bon morceau du monde avant d'arriver ici. Et je n'ai pas le temps de m'asseoir. Je dois être rentré au Paradis pour minuit, sans retard.

 

 

 


 

















 

 

A ces mots, la femme abandonna vivement la galette à son noir destin et leva le dos. Il y avait de la surprise dans ses yeux très bleus, mais aucune peur. De toute évidence, elle vivait familièrement avec les Trépassés. Quand elle vit son hôte si décharné, elle n'eut plus de doute.

‑ Au Paradis, Vierge sainte ! Mais alors, vous êtes mort ?

‑ Oui, mort. Et depuis très longtemps.

‑ Dites-moi vite ! Peut-être avez-vous vu là-bas mon fils Petit Joseph ?

‑ Nous sommes l'un à côté de l'autre. C'est lui qui m'a dit de venir à Kerstribilh pour vous conter ses nouvelles.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


 

 

‑ Pauvre Petit Joseph ! Il se rappelle encore sa mère. Et pourquoi n'est-il pas venu lui-même ?

- Il ne peut pas. Les êtres du Paradis ne sont autorisés à descendre sur terre qu'après la mort de tous ceux qui les ont connus vivants. Avez-vous jamais vu quelqu'un de vos gens en chair et en os devant vous après sa mort ?

‑ C'est vrai et c'est juste. Et comment se trouve Petit Joseph au Paradis, le pauvre ?

 

 

 

 














 

 


 

 

‑ Il est dans la béatitude. Je ne peux pas vous expliquer ce que c'est. Mais une chose le tracasse. Rien d'important, et tout de même... Il dort près de moi. Et depuis que le temps a fraîchi, je l'entends frissonner de froid parce qu'il n'a sur le corps que de tristes vêtements de toile rapiécée. « Je ne sais pas comment, me dit-il souvent, ma mère m'a laissé venir ici sans le moindre gilet de laine. Non, je ne le comprends pas, car j'avais une bonne mère qui m'aimait de tout son cœur. »

 

 

 

 


 


 

 

 

 

La pauvre femme éclata en sanglots et se mit à répandre des larmes amères sur ses vieilles mains.

‑ Hélas ! Il est vrai que je ne suis pas une mère avare ni indifférente. Mais dites-lui ceci : quand il a fallu l'habiller pour le cercueil, j'étais si assommée de douleur que je ne savais plus ce que je faisais. J'ai tiré de l'armoire les vieux vêtements que Petit Joseph mettait pour la moisson, au lieu de présenter ses habits du dimanche à ceux qui faisaient sa toilette. Personne n'a soufflé mot ni demandé davantage. Moi, j'étais comme aveugle. Voilà comment c'est arrivé, je le jure. Ecoutez ! Je vais vous remplir un sac de chemises, de gilets, de braies et de vestes si vous pouvez l'emporter si loin sur votre dos.

 

 













 

 

 

 

 

 


 

‑J'en viendrai à bout, serait-il aussi lourd que du plomb. Le poids, ce n'est rien pour les âmes du Paradis. Petit Joseph fera un joli faraud quand nous irons tous les deux aux pardons, là-bas comme deux frères.

- Des pardons ? Y a-t-il encore des pardons au Paradis ?

‑ Bien sûr. Seulement, au lieu d'avoir des statues de pierre ou de bois dans les églises, nous avons les saints eux-mêmes devant nous. Et quand le pardon est fini, nous allons manger du pain doux et boire un coup de cidre.

‑ Mon Dieu béni ! Et comment donc fait Petit Joseph pour tenir son rang ? Attendez ! Voici dix écus pour lui. Quand ils seront dépensés, revenez en chercher d'autres !

 






























 

 

Et voilà comment, bonnes gens, le pêcheur Nonna s'enfuit vers la côte avec dix écus d'argent dans la ceinture, dix livres de pain noir, une pièce de lard salé, un sac rempli de vêtements chauds et un autre sac, invisible, rempli de bénédictions.

 




















 

 

Autrement, il avait le cœur chargé de honte, mais cette honte se digérait à mesure que le pauvre homme pensait à ses enfants et à sa femme qui pourraient conserver leur vie aux dépens d'un mort qui n'avait plus besoin de rien. Quand la mère de Petit Joseph raconta à son mari ce qui s'était passé pendant qu'il était aux champs, l'homme fut d'abord tenté de se mettre en colère et de lâcher les chiens aux trousses du voleur. Mais sa femme était si heureuse et si apaisée de croire qu'il ne manquait plus rien à son garçon au Paradis que le père n'eut pas le courage de lui enlever ses illusions.

 

 

 

 


 












 

 


 

Plus tard, le vieillard à la pipe révéla comment il avait rencontré le pêcheur saint Pierre lui-même. Et saint Pierre lui avait demandé le plus court chemin pour aller à Kerstribilh. Sûrement, le portier du Paradis était descendu pour apporter quelque secours aux pêcheurs de Penmarc'h, ses filleuls.

 

 

Pierre Jakez Hélias

 

 

 

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Après le déchargement de la pêche, la journée n'est pas finie. Il faut reconduire le bateau à son quai d'attache au fond du port, nettoyer le pont, le matériel de pêche…Partis à 3h du matin, à quelle heure finiront-ils ? Et demain sera un autre jour. Le même.

 

 

 

 









 

 


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Commentaires
L
Bonjour J-Y,<br /> Une très belle série qui nous donne un peu plus l'idée de ce dur travail. <br /> Ils sont bien courageux ces pêcheurs.<br /> Bon dimanche et à bientôt
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A
merci pour ces belles photos très colorées et l'histoire ... dans le souk, moins de lumière, soit les passages sont couverts, soit ils sont étroits ... et donc moins de couleurs.<br /> bonne soirée
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U
La pêche est bonne au guilvinec , il ni a pas si longtemps les bateaux du guil étaient à cherbourg pour le bar ;)<br /> Bonne soirée Erwan<br /> @++
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S
cela doit être un moment impressionnant. Merci pour ce magnifique reportage, et merci d'être passé chez moi.. bon mardi
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J
Les voilà les langoustines ! ! ! même (et surtout) les goélands se régalent et avant nous........<br /> Merci pour les photos et le conte de Monsieur P. J Hélias notre voisin<br /> Bises
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