Un autre regard sur le Cambodge
Selon l’Unicef, « le Cambodge reste l’un des pays les plus pauvres d’Asie, 34% environ de sa population ne survivant qu’avec moins de un dollar par jour. Près de la moitié des enfants cambodgiens sont mal nourris, et le taux de mortalité des moins de 5 ans est passé de 115 pour 1 000 en 1990 à 140 aujourd’hui ».
Parmi les 14 millions d’âmes que compte le Cambodge, près de la moitié a moins de 18 ans.
La pauvreté touche de plein fouet les enfants, particulièrement dans les zones rurales. Les principales causes de mortalité chez les enfants de moins de un an sont des maladies évitables par des vaccinations, ou des maladies facilement curables telles que les diarrhées ou les infections respiratoires.
L'économie du Cambodge dépend encore très largement de l'aide internationale. Elle souffre d'une corruption très importante (pays classé 154e sur 179 de l'Indice de perceptions de la corruption Transparency International en 2010. Plus le pays est corrompu, plus il se situe vers la fin du classement. (Pour information, la France est au 25ième rang, derrière la plupart des pays européens).
De nombreux trafics (pierres précieuses, bois, filières de prostitution, drogues) en direction des pays voisins et un système judiciaire de qualité médiocre pénalisent le développement économique.
Ci-dessus, 4X4 somptueux dans la capitale (des Lexus, la marque de prestige de Toyota). Ils sont nombreux. Dessous, le moyen de transport des paysans dans les campagnes.
Cette corruption semble aujourd’hui apparaître enfin au grand jour, et de plus en plus de pays donateurs ont mis leur aide sous condition.
Officiellement, le gouvernement mené par Hun Sen a fait de la lutte contre la corruption l’un des piliers de sa politique et, dans une allocution récente, le Premier ministre insistait sur la nécessité d’une réforme de fond du système judiciaire.
Mais les habitudes sont difficiles à changer : au pouvoir aujourd’hui, à tous les niveaux de la société, se trouvent ceux qui ont grandi pendant l’ère khmère rouge, où éducation et responsabilité furent durement réprimées, le sens et les valeurs de la famille détruits.
En 2003, le Cambodge a reçu 550 millions de dollars, pour moitié au titre de l'aide multilatérale, pour l'autre moitié par des dons bilatéraux. Sur ces 550 millions, souligne le FMI, 46% (260 millions de dollars) ont servi à payer «l'assistance technique». Un terme pudique pour désigner les rapports d'«experts internationaux» "conseillant" le gouvernement cambodgien sur ses choix.
Pour certains organismes internationaux dédiés à l’Education, plus de 50% du budget disparaît dans les frais de fonctionnement et dans la corruption.
Les paysans riches (7%), principalement des étrangers, contrôlent 40% des terres cultivées du pays, alors que les paysans locaux, les plus pauvres, dans le dénuement le plus total, en disposent de moins de 15%.
A Siem Reap, (une ville près des temples d'Angkor) le boom hôtelier a décuplé les prix du foncier, aiguisant les appétits des spéculateurs. La ville s’étend toujours plus loin, grignotant les terres rurales qui assurent l’autosubsistance des populations. Les paysans n’ont guère de choix : soit ils vendent leurs terres, soit ils sont expropriés.
D'autre part, les concessions publiques de terres à de grandes compagnies forestières ou agro-industrielles (la plupart étrangères) sont monnaie courante. Sur les 18 millions d’hectares que compte le Cambodge, près de 5 millions d’hectares de forêts et 1 million d’hectares de terres agricoles ont été concédés souvent de façon opaque. Les droits des habitants des zones concernées sont censés être pris en compte, mais ils ne sont guère respectés sur le terrain.
Tout est à faire en matière d’éducation. Mais le gouvernement en a-t-il vraiment la conviction ? Jusqu'à présent, il se contente de l'action des ONG comme
"Pour un sourire d'enfant"
qui prend en charge l'éducation et la formation professionnelle des enfants les plus démunis.
Dans la réalité, il faut payer pour les diplômes de ses enfants, pour l’accès aux soins, pour obtenir un emploi ou bénéficier de la protection d’un plus privilégié.
Officiellement, l’école est obligatoire, mais elle est accessible à peu d’enfants pour les raisons suivantes :
- Manque de professeurs et d’écoles,
- Le coût de l’école : en effet, bien qu’officiellement l’école soit gratuite, les professeurs étant sous-payés (30$/mois alors que 60$ sont un minimum pour faire vivre une famille de 4 personnes), ceux-ci en viennent à faire payer les élèves pour pouvoir vivre de leur métier.
- Des professeurs souvent absents, préférant travailler sur leurs terres pour pouvoir se nourrir.
- Des parents qui préfèrent voir leurs enfants les aider pour les travaux domestiques plutôt qu’aller à l’école.
- La malnutrition (chronique) et les maladies parasitaires ou autres empêchent les enfants de suivre correctement.
- Dans beaucoup d’écoles il n’y a pas de matériel : pas de cartable, la craie est rare, les rares pages de cahiers sont des trésors, pas d’affiches, pas de toilettes, pas de ventilateurs. Le ramassage scolaire est absent.
Texte en italique suivant, source :
Legal Support for Children and Women.
Un proverbe cambodgien dit que " les hommes sont semblables à l'or et les femmes semblables à un morceau de tissu de lin blanc. " Même si l'or est jeté au feu, il reste le même après. En revanche, le tissu de lin blanc, une fois souillé, n'est plus d'aucune utilité". L'idée que les femmes et les filles sont des marchandises à vendre prédomine encore dans la société cambodgienne.
De même, la virginité y tient une place disproportionnée. S'il arrive qu'une fille soit droguée puis violée, sa valeur en tant qu'épouse désirable devient pratiquement nulle. Elle est non seulement tenue responsable de sa situation mais aussi du déshonneur porté à sa famille. Ce sentiment de honte reste profondément ancré en elle.
Par ailleurs, une telle mentalité misogyne et un faible niveau d'éducation conduisent bon nombre de femmes et de jeunes filles à faire des choix désespérés et à courir le danger permanent d'être dupées et vendues aux réseaux de prostitution.
La pauvreté, l'illettrisme, les problèmes familiaux ainsi que la discrimination sexuelle constituent des terrains propices au trafic des êtres humains, à l'exploitation, au viol et aux mauvais traitements.
De plus l'écart du taux d'alphabétisme entre les hommes et les femmes Cambodgiennes est de 20% : 84,7% et 64,7% respectivement.
La pauvreté pousse les filles et les femmes à essayer d'aider financièrement leur famille. Lorsqu'elles partent à la recherche d'un travail loin de chez elles, certaines peuvent se retrouver victimes des mensonges et des pièges des trafiquants. L'opinion publique estimant que des filles soi-disant " respectables " ne s'engageraient jamais dans de telles activités, ces filles subissent souvent la discrimination, l'humiliation, la diffamation et l'abandon. Elles deviennent ainsi plus vulnérables et susceptibles de tomber dans les réseaux de prostitution, attirées par de fausses promesses d'un emploi plus convenable ailleurs.
Très souvent, cela se traduit par ce qu'on appelle " l'esclavage pour dette. " La jeune fille est vendue au propriétaire d'une maison close. Ses revenus, qui lui sont confisqués, servent à rembourser la dette de sa famille et à rémunérer son employeur.
Les jeunes filles sont souvent contraintes au mariage précoce. De plus, il n'est pas rare que des parents forcent leur fille victime de viol à épouser le violeur. Malheureusement les apparences sont primordiales au Cambodge.
On assiste à une vente esclavagiste pure et simple des femmes pauvres aux étrangers (particulièrement aux Sud-Coréens) par leurs maris ou des filles par leur père.
Dans les yeux de la petite fille ci-dessous, toute la tristesse du Cambodge :