Le monastère d'Arkadi, symbole de la Résistance Crétoise
Le monastère d’Arkadi est un monastère orthodoxe situé sur un plateau à 23 km au sud-est de Rethymnon. Il est le symbole de la Résistance Crétoise contre les Turcs. Il fut fondé par un moine nommé Arkadios au début du XIIIème siècle.
Arkadi : petite étoile près du carré rouge (Réthymnon)
Bien que la Crète se soit soulevée contre l'occupant ottoman lors de la guerre d'indépendance grecque (1821/1830), le protocole de Londres de 1830 ne permet pas à l'île de faire partie du nouvel État grec. D'où la révolte crétoise de 1866/1869.
Arkadi fut un centre actif et un des hauts lieux de la résistance contre l'occupation ottomane, ce qui fit sa célébrité. Entouré d'épaisses et hautes murailles et situé sur un plateau difficilement accessible, le monastère est une véritable forteresse.
Le 7 novembre 1866, de nombreux habitants des environs, et en particulier des femmes et des enfants, trouvent refuge au monastère. Ce jour-là, le monastère abrite 964 personnes : 325 hommes dont 259 sont armés, le reste étant des femmes et des enfants.
Au matin du 8 novembre, une armée de 15 000 Turcs avec 30 canons, dirigée par Suleyman arrive sur les hauteurs du monastère.
Il est impossible pour des renforts crétois d'arriver jusqu'au monastère dans la mesure où toutes les routes d'accès sont bloquées par les Turcs.
Après trois jours de combat, alors que des centaines de Turcs sont désormais entrés dans le monastère, les derniers Crétois survivants se réfugient dans la poudrière.
Les Turcs se pressent à l'entrée de ce refuge, mais, sur les ordres du supérieur du monastère, l'higoumène Gabriel, les Crétois font sauter les barils de poudre, préférant se sacrifier plutôt que de se rendre.
Tous, sauf une centaine, sont morts lors de l'assaut. Sur les 964 personnes présentes au début du combat, 846 sont tuées. 114 hommes et femmes sont capturés, trois ou quatre parviennent à s'échapper.
À l'extérieur du monastère, à une soixantaine de mètres à l'ouest, se trouve un bâtiment (l'ancien moulin du monastère) commémorant le sacrifice des Crétois morts en 1866. Les ossements de nombreux chrétiens furent recueillis et placés dans ce moulin transformé en ossuaire en hommage aux héros d'Arkadi.
Les Ottomans considérèrent la prise d'Arkadi comme une grande victoire et la célébrèrent solennellement en tirant des coups de canon. À l'inverse, ailleurs, les évènements d'Arkadi provoquèrent émotion et indignation, chez les Crétois, mais aussi en Grèce et dans le reste du monde.
Le monastère est devenu aujourd'hui un sanctuaire national en l'honneur de la Résistance crétoise. Le 8 novembre est désormais le jour de fêtes commémoratives à Arkadi et à Rethymnon. L'explosion ne mit pas un terme à l'insurrection crétoise, mais attira l'attention de l'Europe sur ce peuple qui se battait pour son indépendance.
La Guerre d'Indépendance grecque avait déjà soulevé un courant de sympathie en Europe, surtout après le massacre de Chios.
Chios était une des îles les plus riches de la mer Égée. En mars 1822, le Sultan partit à la reconquête de l'île avec une troupe de 30 000 hommes.
La résistance des Grecs fut brève. Repoussés, ils finirent par évacuer l'île tandis que la population commença à être systématiquement massacrée et les otages exécutés. Une bonne partie de la population fut réduite en esclavage et vendue sur les marchés. Les estimations les plus courantes sont de 25 000 morts et de 45 000 personnes réduites en esclavage.
Une immense émotion face aux horreurs commises traversa l'Europe.
Le recueil Les Orientales de Victor Hugo, comprend un poème, "L'enfant grec", consacré au massacre de Chios. Extraits :
L'enfant grec
Tout est désert. Mais non ; seul près des murs noircis,
Un enfant aux yeux bleus, un enfant grec, assis,
Courbait sa tête humiliée ;
Il avait pour asile, il avait pour appui
Une blanche aubépine, une fleur, comme lui
Dans le grand ravage oubliée.
Que veux-tu ? Bel enfant, que te faut-il donner
Pour rattacher gaîment et gaîment ramener
En boucles sur ta blanche épaule
Ces cheveux, qui du fer n'ont pas subi l'affront,
Et qui pleurent épars autour de ton beau front,
Comme les feuilles sur le saule ?
Veux-tu, pour me sourire, un bel oiseau des bois,
Qui chante avec un chant plus doux que le hautbois,
Plus éclatant que les cymbales ?
Que veux-tu ? Fleur, beau fruit, ou l'oiseau merveilleux ?
Ami, dit l'enfant grec, dit l'enfant aux yeux bleus,
Je veux de la poudre et des balles.
Victor Hugo, Les Orientales, 1829