Guyane : préparation du couac
L'abattis est le système agricole ancestral des Amérindiens vivant en forêt depuis des millénaires. Cette pratique a été adoptée par les communautés qui se sont ou ont été installées en Guyane française (Noirs Marrons, Créoles, Haïtiens, Brésiliens, H'mongs, etc.). Le terroir forestier est défriché en partie : les arbres sont coupés sommairement et laissés sur la parcelle, qui est ensuite brûlée.
Le brûlis intervient à la fin de la saison sèche, entre octobre et novembre, après le sabrage et l’abattage des arbres entre juillet et septembre. Le semis et la plantation des cultures commencent en novembre avec les premières pluies.
Les plantes cultivées varient suivant les communautés. Chez les Noirs Marrons au Nord-Ouest de la Guyane, l’abattis est généralement consacré aux légumes dans sa première année de mise en culture, de sorte que les premières récoltes peuvent être effectuées à partir de mars.
Une deuxième campagne de mise en culture se déroule entre janvier et mars. Elle concerne les patates douces et le manioc qui seront récoltés à partir de juillet. De manière générale, le manioc semble être la plante la plus cultivée dans les abattis. Durant la phase de croissance des cultures, les mauvaises herbes sont éliminées par le sarclage.
On en cultive deux variétés principales :
Le manioc amer non consommable sans traitement préalable car les racines contiennent du cyanure.
Le manioc doux dont les racines sont directement consommables.
Consommées bouillies pour les variétés douces ou cuisinées après un processus de détoxification pour les variétés amères, les tubercules de manioc sont la base d’une vingtaine de préparations culinaires : farine de manioc (couac blanc, couac jaune), galettes de manioc (cassaves épaisses, cassaves fines), bière de manioc (cachiri), soupes, desserts sucrés, condiments pour accompagner les viandes et les poissons.
Ci-dessous, au premier plan, des petits sacs de couac vendus sur le marché de Cayenne :
Puis on les réduit en une pâte grossière à l'aide de la "planche à grager", une tôle ou une planchette criblée d'impacts de pointes. Aujourd'hui, un broyeur tend à remplacer cet instrument. La bouillie ainsi obtenue est ensuite introduite dans une "couleuvre", une vannerie tubulaire allongée, pourvue d'une boucle à chaque extrémité.
La couleuvre est ensuite étirée pour presser la pâte et en exprimer le jus toxique (cyanure). Le jus toxique est récupéré puis détoxifié à son tour par une longue cuisson, et peut être consommé sous forme de soupe. Le tapioca se concentre généralement dans le bas de la couleuvre.
La pulpe est effritée et tamisée à l'aide d'un manaré tressé pour extraire les fibres ligneuses et les gros morceaux. Cette semoule crue est alors grillée sur une grande platine en acier de diamètre supérieur à 1m, posée sur un feu.
Pendant cette opération, il faut veiller à retourner sans cesse la semoule pour éviter qu'elle ne s'agglomère. Cette semoule grillée est appelée "couac" ou "farine de manioc" (farinha de mandioca au Brésil).
Le couac remplace le pain lors de tous les repas. Il peut être consommé seul (cru), en salade (façon taboulé), grillé à la poêle dans des matières grasses pour un accompagnement (plat nommé Farofa au Brésil), etc.
De conservation longue et facile, nourrissant, naturellement déshydraté, il entre idéalement dans le menu des gens séjournant en forêt.
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Gendarmerie de Grand Santi :
Deuxième campement sur le Maroni (en jaune sur la carte) :
Départ des enfants du village pour l'école :