Maroc : les Berbères
Les Berbères, premiers occupants de l'Afrique du nord, occupaient un large territoire qui allait de l'ouest de la vallée du Nil jusqu'à l'Atlantique ainsi que l'ensemble du Sahara où ils fondèrent de puissants royaumes, formés de tribus confédérées.
Les conquérants arabes du VIè et VIIè siècle ap JC, peu nombreux, ne trouvèrent pas en face d’eux un état prêt à résister à une invasion, mais des opposants successifs :
- Les Byzantins, enfermés dans les murs de ses villes côtières, n’avaient ni la possibilité ni la volonté de résister longtemps à ces envahisseurs.
- Les Berbères qui, tribu après tribu, sans véritable coalition, se dressaient contre eux.
En 698, Carthage, ville byzantine, était définitivement conquise par les Omeyyades (une dynastie de califes de 661 à 750 dont l'empire, ayant pour capitale Damas, s'étendait de l'Indus jusqu'à la Péninsule Ibérique.)
Les Byzantins battus, les Berbères se retrouvèrent seuls face à l'envahisseur arabe. Une femme prit alors la tête du dernier groupe de combattants. Elle est connue dans l'histoire sous le nom de la Kahena (la Sorcière), nom que lui donnèrent les Arabes. Elle appartenait à une tribu berbère des Aurès. Elle réussit à remporter plusieurs batailles. Mais dans un dernier combat dans la région de Gabès, elle fut vaincue. Persuadée de sa fin prochaine, elle demanda à ses deux fils de se convertir à l'islam afin de sauvegarder sa lignée. Puis elle prit le maquis. Pourchassée par les Arabes, ceux-ci la rattrapèrent, la tuèrent, la décapitèrent et allèrent porter sa tête au Calife.
Aujourd’hui dans le Maghreb, les zones berbérophones sont toutes des régions montagneuses, comme si celles-ci avaient servi de bastions et de refuges aux populations qui abandonnaient progressivement les plaines aux envahisseurs.
Répartition des langues au Maroc (source : Wikipédia)
Les Berbères s'appellent eux-mêmes "Amazigh", hommes, hommes libres, et c'est le même mot, au féminin, le "tamazight", qui désigne la langue (le féminin d’un mot se forme toujours en ajoutant un T au début et à la fin du radical).
La culture berbère se définit d'abord par sa langue. Les mouvements "Amazighs" se sont fédérés autour de la défense de la langue. La Constitution du 1er juillet 2011 du Maroc consacre le Tamazight comme "langue officielle de l'État, en tant que patrimoine commun à tous les Marocains sans exception".
Le Maroc est sans doute le plus berbérophone de tous les pays. Une récente estimation montre qu'entre 40 et 60% de la population marocaine parle le berbère. Celui-ci est réparti entre plusieurs dialectes, le rifain ou tarifit au nord, le braber ou tamazight dans le Haut Atlas, le Moyen Atlas et au centre du pays, le chleuh, ou tachelhit, dans le Haut Atlas et l’Anti Atlas, et le zénète près de la frontière algérienne. Au Maroc, les noms de lieux et de villages sont le plus souvent berbères, et très souvent liés à la nature.
Cette langue a un alphabet, le Tifinagh. Tombé dans l'oubli jusqu'aux années 60, il n'était plus utilisé que dans sa version archaïque par les Touaregs. Après l'indépendance, le système de transcription en caractères latins a été abandonné, et l'IRCAM (l’Institut Royal de la Culture Amazigh) a mis en place un tifinagh moderne, qui est aujourd'hui utilisé au Maroc :
Les Touaregs sont des Berbères nomades sahariens. Leur pays, ou Keltamachek, s'étend au cœur du Sahara. Les Touaregs sont divisés en 8 grandes confédérations qui ont tous en commun une langue, le tamachek. Avec la décolonisation, le peuple touareg, malgré sa demande, a été éclaté entre 5 états : l'Algérie, le Mali, le Niger, la Lybie, et le Burkina Faso.
(Territoire Touareg, source Wikipédia)
Devenus étrangers dans des pays qui n'étaient pas le leur et qui leur imposaient la sédentarisation par la confiscation de leurs chameaux, ils se révoltèrent à plusieurs reprises (c'est l'une des causes des révoltes au Mali et dans les autres pays concernés par la population touareg). Depuis 1958, leur mouvement, le MNA (Mouvement National pour la Libération de l'Azawad), réclame l'indépendance (ou l'autonomie) de "l'Azawad", un territoire presque désertique du Nord Mali, et se défend d'être extrémiste, malgré leur alliance dangereuse avec AQMI. Azawad signifierait "zone de pâturages" en langue touareg.
Drapeau de l'Azawad
De tradition, les berbères sont plutôt peu polygames. Et ils le sont de moins en moins, avec l’impact du nouveau code de la famille qui permet à la femme de demander un divorce avantageux pour elle si son mari veut lui imposer une deuxième épouse.
Filles et garçons peuvent se choisir librement et s’épouser, et cela grâce aux "Fiancés d'Imilchi".
C'est une légende berbère qui raconte qu'une jeune fille Aït Yaaza aimait un bel Aït Ibrahim. Mais le malheur voulait que ces jeunes gens appartiennent à deux factions rivales de la tribu Aït Hadiddou. Comme Roméo et Juliette, ils connurent la même destinée tragique, mourir sans pouvoir s'aimer librement ni se marier.
Ils pleurèrent leur affliction, et toutes les larmes de leur corps donnèrent naissance aux lacs jumeaux Isli (le fiancé) et Tislit (la fiancée). Eux mêmes moururent noyés dans leurs propres larmes, sans jamais pouvoir se rapprocher.
Leurs parents, repentis, décidèrent qu’une fois par an, jeunes gens et jeunes filles pourraient se choisir librement, et que ceux qui décidaient au moussem (fête) d'Imilchi de se marier, ne rencontreraient aucune opposition à leur union.
De tradition, un berbère ne bat pas sa femme. Comme pour les Touareg, c’est d’ailleurs une grande honte que de se laisser aller à de telles extrémités. Le mari coléreux, ne sachant pas se contenir, sera regardé de travers.
L’homme et la femme ont des sphères assez séparées, et les deux sexes se mélangent peu, même dans le cadre familial.
L'hospitalité est celle des nomades, pour lesquels l'hôte a toujours droit à une place sous la tente, protection contre le désert hostile. La "cérémonie du thé" berbère est celle de l'accueil et du plaisir de partager.
Le thé n’a été introduit qu’au XIXè siècle. Rapidement adopté, le thé vert s’est répandu partout, et le plus isolé des nomades a toujours avec lui de quoi faire le thé, au minimum une petite théière en métal, quelques verres, un petit plateau, et du sucre (encore vendu en pains, -ci-dessous-).
Le rituel est toujours le même. On met à bouillir de l'eau, puis on ajoute le thé en proportion égale à l’eau, puis les tiges de menthes couvertes de feuilles et cassées pour entrer dans la théière, enfin les morceaux de sucre, posés sur les feuilles. On Laisse bouillir plus ou moins longtemps selon son goût.
On sert le thé dans un premier verre que l'on reverse dans la théière. On recommence cette opération deux ou trois fois pour mélanger le sucre. Enfin on sert son hôte.
On ne refuse pas une invitation à boire le thé, c’est une insulte grave.
Un proverbe nomade dit :
"Le premier verre est fort comme l’amour, le second verre est amer comme la vie, et le troisième doux comme la mort".
Le drapeau Amazigh
C'est dans les années 1970 que l'Académie berbère (Agraw Imazighen) présente le premier drapeau berbère.
En 1998, le Congrès mondial amazigh officialise le drapeau à Tafira (Las Palmas de Gran Canaria), dans les Îles Canaries — peuplées autrefois par les Guanches, ancien peuple berbère.
Le drapeau est composé de trois bandes horizontales de même largeur (bleu, vert, jaune) et de la lettre Z (aza en tifinagh) en rouge.
Chaque couleur renvoie à un élément du Tamazgha, territoire où vivent les Berbères (correspondant au nord de l'Afrique) :
Le bleu représente la mer Méditerranée et l'océan Atlantique ;
Le vert représente la nature et les montagnes verdoyantes ;
Le jaune représente le sable du désert du Sahara.
La lettre Z de l'alphabet tifinagh (le aza ou yaz) représente l'«homme libre», amazigh en berbère, imazighen au pluriel, nom que se donnent les Berbères.
Il est ici en rouge, couleur de la vie, mais aussi couleur de la résistance.
Le drapeau berbère symbolise donc le peuple amazigh, dans sa globalité, vivant en harmonie avec sa terre, Tamazgha.
Sources :
"Histoire des Berbères" de Bernard Lugan.
Bernard Lugan est un universitaire. Il dirige un séminaire à l'École de Guerre, dispense un enseignement aux Écoles de Saint-Cyr-Coëtquidan, et dirige la revue mensuelle par Internet "l'Afrique réelle" :
http://bernardlugan.blogspot.fr/
Sources Internet :
http://www.mezgarne.com/maroc/